Carrasco : « Passer en WorldSBK a été la meilleure décision de ma vie »
La Championne du Monde en titre du WorldSSP300 explique ce qui a changé pour elle depuis son arrivée dans le paddock WorldSBK, sa philosophie de vie, son ambition et bien plus encore.
Elle est née à Cehegín en Espagne, âgée de 22 ans, et officie en Championnat du Monde. Ce n’est pas n’importe quel pilote, mais la Championne du Monde 2018 du Championnat FIM World Supersport 300. Ana Carrasco (Kawasaki Provec WorldSSP300) a participé ce week-end à la première épreuve de la saison pour défendre sa couronne. Cela ne s’est pas passé comme elle l’aurait souhaité — avec une chute en milieu de course — mais l’Espagnole n’est pas du genre à laisser un petit faux pas la freiner. Fougueuse, talentueuse et travailleuse, c’est une pionnière selon ses propres mots.
Beaucoup de choses ont changé depuis ma venue dans le paddock en 2017. J’avais participé au Championnat du Monde en Moto3™ et j’avais dû faire face à plusieurs blessures qui m’ont beaucoup coûté. Je suis venue ici pour repartir à zéro. Je suis arrivée avec le désir de grandir et de prouver à tout le monde que je pouvais être rapide, que je pouvais gagner. Et je pense que c’est assez clair maintenant.
Passer en WorldSBK a été la meilleure décision de ma vie, je suis vraiment heureuse d’être ici et je ne changerais pour rien au monde. Kawasaki est l’équipe avec laquelle je veux être. Provec me donne tout ce dont j’ai besoin. Je pense que sur le plan sportif, je vis le meilleur de ma carrière.
J’ai commencé tout ça comme passe-temps, lorsque j’avais trois ans. Mon père était mécanicien, j’ai participé à quelques courses avec lui et nous avons gagné. Jusqu’à mes 14 ans, je l’ai fait parce que j’aimais faire de la moto, c’était amusant. Quand j’ai rejoint le championnat national, les choses sont devenues sérieuses. C’est là que j’ai envisagé de passer professionnelle.
Je n’ai pas eu une carrière facile. J’ai vécu des situations qui m’ont presque forcé à arrêter, plusieurs fois. J’ai eu des problèmes avec des sponsors, des équipes.... J’ai dû surmonter tant de choses pour gagner. Mais nous sommes parvenus à renverser la vapeur et à devenir champions du monde.
C’est de là que vient mon surnom de « Pink Warrior », cette philosophie d’un guerrier qui se bat jusqu’au bout. Ce qui a façonné ma carrière, c’est de ne jamais avoir perdu la conviction que je pouvais réussir.
Je n’ai jamais eu l’impression d’avoir à franchir des obstacles ou à franchir des étapes importantes simplement parce que j’étais une fille. Mon but a toujours été d’être la meilleure et de gagner des championnats. Mon objectif n’a jamais été de faire tomber les barrières, mais de réaliser de bonnes performances.
Je pense que nous devons beaucoup travailler en termes d’égalité des sexes et j’essaie de le faire avec mon travail, mais je ne me considère pas comme une idole féministe ou quoi que ce soit du genre. Je pense qu’il faut travailler pour décrocher des résultats, et les résultats s’accompagnent de changements. C’est ce que j’ai fait toute ma vie et je suis ravie que mes accomplissements puissent aider en ce sens
Sur le circuit, je suis pilote, en dehors, je suis une femme. C’est ce que je dis toujours. Quand je franchis ces portes, mon travail et mes objectifs sont les mêmes que ceux des autres. Je ne me suis jamais considérée différente de mes adversaires.
Courir comme une fille, cela veut dire bien rouler et gagner des titres. Nous avons profité de ce moment pour montrer au monde entier que le talent du pilotage n’est pas une question de sexe, mais de travail.
Je ne pense pas beaucoup dans les moments qui précèdent une course. La stratégie a déjà été établie, bien qu’en avoir une soit difficile dans cette catégorie. J’essaie de laisser mon esprit s’assombrir quand je cours, c’est surtout un championnat où l’on improvise. Si vous avez un plan et que cela ne fonctionne pas, vous pouvez facilement vous retrouver à l’écart. Alors, je m’adapte aux situations.
Non, je ne prie personne au bout d’une ligne droite, pas même Saint Brembo (rires) ! Nous sommes habitués à la vitesse et tout semble lent sur la piste, même si vous atteignez le bout de cette ligne droite à 200 km/h. C’est une situation différente quand nous arrivons à sept de front, dans ces moments-là, on se met à prier n’importe qui !
Gagner, c’est ce qui me motive. Honnêtement, j’adore ce sentiment quand je remporte une victoire. Je veux dire, bien sûr que j’aime piloter, mais piloter et participer à une course sont deux choses très différentes. Un week-end de course en Championnat du Monde, c’est stressant, on est sur les nerfs, il y a beaucoup de travail, et il faut toujours se donner à 100 %, quelles que soient les conditions. Tout cela mis bout à bout, ça ne vous fait pas vraiment apprécier de piloter, donc mon seul but est de gagner : si je triomphe le dimanche, alors j’aurai profité. C’est ma récompense pour ces jours de dur labeur.
J’ai eu de la chance d’avoir l’aide de Johnny (Rea) l’année dernière, il m’a donné quelques conseils et maintenant nous sommes pratiquement coéquipiers. Être si proche du meilleur pilote de l’histoire du WorldSBK est un énorme plus. Je ne pourrai pas avoir de meilleur mentor !
Aucune femme n’a jamais couru en WorldSBK ? Aucune femme n’avait jamais gagné un Championnat du Monde ! Les seules limites sont celles que vous vous fixez. Je me rends compte qu’entrer en WorldSBK ou en MotoGP™ est difficile, parce que c’est là que les meilleurs du monde officient, mais je n’ai que 22 ans, j’ai encore de nombreuses années devant moi et beaucoup de choses à apprendre, c’est un objectif à long terme.
Je ne sais pas si je serai encore là dans dix ans. J’aurai 32 ans... On ne sait jamais, ce sport évolue très vite d’une année à l’autre. Cela dépend de l’évolution de votre carrière et de votre volonté d’aller de l’avant. Mais j’aimerais rester dans cet environnement, travailler au sein d’une équipe ou diriger mon propre team.
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